Ferme de rue: Démocratiser l’agriculture urbaine
L'organisme mobilise les citoyens et commerçants de son quartier pour que toute la communauté prenne activement part à son projet de verdissement nourricier. «Je cultive mon terrain depuis plus de...
En préambule du Forum Novae, qui se tiendra cet automne à Montréal, nous allons à la rencontre d’experts dans les domaines de l’alimentation, de l’énergie, de la finance et de l’architecture afin d’en décoder certaines tendances. Nous nous penchons aujourd’hui sur la notion de «système alimentaire alternatif», avec René Audet, professeur au Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l’ESG et titulaire de la Chaire de recherche de l’UQAM sur la transition écologique.
Dans un article paru en 2016 dans la revue scientifique Cahiers de recherche sociologique, René Audet explique que «la mise en marché alternative de l’alimentation vise à favoriser l’accès de proximité à une saine alimentation via la mise en réseau des producteurs et des consommateurs au sein de circuits courts, tout en poursuivant des objectifs de développement social et communautaire, de convivialité et de sécurité alimentaire dans les quartiers.» Ainsi, le chercheur s’intéresse notamment aux techniques de consommation et d’approvisionnement en marge du système alimentaire traditionnel constitué notamment de grossistes en fruits et légumes et de grandes enseignes de distribution.
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« Les dépanneurs fraîcheurs sont pour moi un parfait exemple de la façon dont les systèmes alimentaires évoluent : ils sont au croisement entre le secteur traditionnel et alternatif. Installés dans des zones urbaines considérées comme des déserts alimentaires, ils ont un impact à la fois social, environnemental et économique.» Le programme Dépanneur Fraîcheur est un projet-pilote qui accompagne et accrédite des dépanneurs situés dans des quartiers de Montréal mal desservis en fruits et légumes et qui choisissent d’en améliorer l’accès. Cette initiative permet de rejoindre plus particulièrement les résidents qui ont une mobilité réduite, un faible revenu et pour qui le dépanneur est souvent le commerce le plus accessible. « Ces établissements sont complémentaires aux marchés de quartiers, qui se sont multipliés à Montréal depuis quelques années. Ces marchés visent à favoriser l’accès de proximité à une saine alimentation dans des quartiers mal desservis au plan de l’offre alimentaire, en mettant en relation des producteurs et des consommateurs au sein de circuits-courts. Ces initiatives poursuivent également des objectifs de développement social et communautaire, de convivialité dans les quartiers et surtout de sécurité alimentaire. » Parmi les plus populaires notons les marchés Ahuntsic-Cartierville et Solidaire-Frontenac qui se démarquent par la cohésion sociale qu’ils apportent dans leurs secteurs respectifs.
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Selon René Audet, ces diverses initiatives communautaires font écho à d’autres initiatives entrepreneuriales. « Il y a aujourd’hui un véritable engouement pour l’entrepreneuriat alimentaire, notamment en ce qui concerne l’agriculture urbaine ou la lutte contre le gaspillage alimentaire. Les 20-40 ans sont très enthousiastes et créent des organisations – qu’il s’agisse d’OBNL, de coopératives ou d’entreprises privées – avec pour objectif de changer notre rapport à l’alimentation.» Pensons à Récolte, un organisme qui accompagne les entrepreneurs du secteur alimentaire dans le but de les aider à développer une alimentation locale, saine et durable. Ou AU/LAB, un laboratoire de recherche et d’intervention en agriculture urbaine qui se positionne comme un lieu de réflexion sur l’alimentation. « Le défi principal de ce type d’organisation est financier: il y a encore trop peu de richesse qui se crée et peu de revenus générés par ces différentes activités. Il faut trouver un modèle économique viable qui permette à tous ces innovateurs de vivre de leur travail. Une solution est peut-être que toutes ces organisations collaborent davantage en réseau afin de gagner en solidité financière. »
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Malgré cette fragilité financière, le système alimentaire alternatif exerce déjà une influence à plusieurs niveaux. Selon René Audet, les grandes entreprises s’en inspirent pour adapter au mieux leur offre face à la demande des consommateurs. « Les grandes enseignes alimentaires s’inspirent de ce qui se fait à une plus petite échelle depuis plusieurs décennies. Prenons l’exemple du bio: il y a quelques années les Metro et IGA de ce monde ne voulaient pas en entendre parler. Aujourd’hui toutes ces chaînes ont des rayons dédiés aux produits biologiques. Ce phénomène est en train de se reproduire avec les produits locaux issus d’initiatives entrepreneuriales. Et c’est tant mieux. Car un véritable changement structurel de nos pratiques alimentaires passera aussi, quoiqu’on en dise, par la grande entreprise. »
Photo de Une : Inauguration du toit végétalisé du Palais des congrès de Montréal (photo par Laura Howard)
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