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De Montréal à Vancouver, les grillons comestibles ont la côte

Par Marie Allimann | 13 avril 2017 | Consommation

Aux quatre coins du pays, l’engouement pour les produits alimentaires à base d’insectes grandit de plus en plus. Lumière sur les startups qui redéfinissent les frontières de l’industrie alimentaire.

Le phénomène Exo, cette start-up de Brooklyn qui fabrique des barres protéinées à base d’insectes et qui a levé il y a un an un financement de 4 millions de dollars pour accélérer son développement, semble avoir donné des idées à plusieurs entrepreneurs. Coïncidence ou non, depuis ce financement record pour un produit alimentaire à base d’insectes, d’autres entreprises aux valeurs similaires bénéficient en effet d’un intérêt grandissant. C’est notamment le cas au Québec de Näak, une jeune entreprise qui a développé une barre d’énergie destinée aux grands sportifs d’endurance et pouvant également convenir comme collation à toute personne active. « J’ai l’habitude de comparer les produits alimentaires à base d’insectes avec les sushis. Il y a 30 ans, la majorité des gens étaient très réticents à l’idée de consommer du poisson cru mais aujourd’hui cela s’est véritablement installé dans les mœurs. Je suis convaincu que c’est ce qui va se passer avec les insectes », raconte Antoine Domergue, cofondateur de Näak. À Vancouver, l’entreprise Coast Protein, qui propose également des barres protéinées, vient de lever plus de 40 000 dollars en sociofinancement en vue de développer sa gamme de produits.

Lire aussi : Exo, quand les criquets font recette

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Au Québec, la startup Näak a développé une barre d’énergie destinée notamment aux grands sportifs d’endurance.

Si ces entrepreneurs s’engagent dans l’aventure des insectes comestibles, c’est que les grillons et autres criquets sont de plus en plus vus comme la nourriture de l’avenir, non seulement pour leur grand apport nutritif mais aussi pour leur faible empreinte environnementale. Par exemple, de la farine de criquet contient 65% de protéines contre 23% pour le poulet et 12% pour les œufs. Et l’élevage de criquets produit 100 fois moins de GES que celui de vaches. « Ce dont les grillons ont vraiment besoin maintenant pour séduire définitivement l’opinion publique, c’est un ajustement d’image, explique Dylan Jones, le fondateur de Coast Protein. Pour le moment, ce n’est pas encore assez attrayant, mais l’émergence de plusieurs startups au style léché est en train de changer la donne. » Un autre élément qui joue en défaveur de la démocratisation des insectes comestibles est le prix élevé de ces produits: les barres protéinées sont actuellement vendues entre 4$ et 7$. « Plus les gens vont se mettre à consommer des produits à base d’insectes, plus les prix vont baisser, estime Dylan Jones. Actuellement, l’état du marché ne nous laisse pas le choix d’afficher des prix aussi hauts, mais cela va changer. »

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La farine de criquet contient 65% de protéines contre seulement 23% pour le poulet et 12% pour les œufs.

C’est en Ontario qu’on trouve la plus grosse ferme entomophagique (ferme où sont élevés les insectes) d’Amérique du Nord : Entomo Farms abrite environ 90 millions de criquets à différents stades de développement, et la majorité des entreprises qui développent des produits à base d’insectes comestibles s’approvisionnent auprès de cette ferme. C’est le cas notamment de Crik Nutrition, de Winnipeg, qui utilise la poudre de criquets dans ses compléments alimentaires. En plus d’être vendus au Canada, les grillons de Entomo Farms sont exportés aux États-Unis, en Afrique du Sud, en Nouvelle-Zélande, en Australie, en Europe et au Mexique.

En Afrique, la startup Aspire, créée par l’entrepreneur canadien Mohammed Ashour, aide les petits agriculteurs de Kintampo, une ville de la région de Brohn Ahafo au Ghana, à cultiver des larves de charançons de palmier. Riches en protéines et peu coûteuses à élever, elles sont ensuite servies grillées, séchées, frites, en soupes ou en ragoûts. Puisqu’elles arrivent à maturité en seulement quatre semaines, ces larves d’insectes y sont devenues une option durable pour l’alimentation des familles ou le démarrage de petites entreprises en alimentation.

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À l’échelle politique aussi la cause des insectes trouve un certain écho. L’ONU a publié en 2013 un rapport intitulé Edible insects: Future prospects for food and security, qui recommande d’intégrer les insectes comestibles dans l’alimentation humaine afin de réduire notre impact environnemental tout en offrant une alimentation riche en protéines et minéraux. Le rapport souligne en outre que la poudre de grillons est considérée comme la source de protéines complètes la plus éco-responsable au monde: pour produire la même quantité de protéine que le bœuf, le grillon a besoin de 12 fois fois moins de nourriture et de 2000 fois moins d’eau.

Alors que plus de 2 000 espèces d’insectes comestibles ont déjà été recensées (incluant les chenilles et les fourmis), aujourd’hui, l’entomophagie (la consommation d’insectes) touche déjà plus de 2 milliards d’adeptes, principalement en Asie et en Amérique de Sud, soit un tiers de la population mondiale. « Je pense qu’on assiste déjà à un changement de perception chez le consommateur. Aujourd’hui, nous n’avons presque plus besoin d’expliquer aux gens que nous pouvons manger des insectes, ce qui est déjà un grand pas en avant. La prochaine étape consistera à communiquer davantage sur les bienfaits environnementaux qui émanent de l’entomophagie, et qu’il s’agit d’une des solutions pour repenser l’alimentation », conclut Antoine Domergue.


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